New

La tribune à Catherine Cibien, directrice scientique du MAB France et Didier Babin, président du MAB France.

Un des chantiers prioritaires du gouvernement est la planification écologique, afin d’accélérer la transformation de notre société et l’adaptation aux conséquences du changement climatique. Elle est annoncée comme visant à contrôler la cohérence des politiques publiques et environnementales en impliquant les acteurs publics et privés. Elle ne doit surtout pas menacer ou dégrader la biodiversité et doit aller au-delà de la seule transition énergétique pour être véritablement « écologique ». Ne nous trompons pas, la transformation ne pourra pas se satisfaire de mesurettes, c’est un changement de trajectoire qu’il faut opérer y compris dans nos modes de production et de consommation. Vaste chantier et défi socio-économique à relever !

Il va donc s’agir de rendre cohérents les différents niveaux d’intervention publique, de l’international au local. Le premier travail devrait être, dans le domaine de la biodiversité (comme dans celui du climat), de bannir sans délai les subventions et la fiscalité néfastes, estimées à plusieurs dizaines de milliards d’euros par an, et de réorienter ces sommes vers des projets contribuant à sa conservation ou sa restauration et à accompagner les acteurs pour amoindrir les chocs socio-économiques des transitions à réaliser.

Les Réserves de biosphère peuvent-elles être utiles à ce chantier ? Depuis leur conception dans les années 70, elles cherchent à constituer un modèle de gestion durable des territoires. Tout ou partie de leurs « concepts clés », novateurs dans les années 70, sont depuis largement repris par de nombreux dispositifs :

  • La nécessité de considérer « en même temps » la conservation de l’ensemble du vivant non-humain et la prospérité des humains. Leurs destins sont profondément liés.
  • Des projets de territoires conçus au travers d’une participation locale active ; co-construits avec des acteurs et habitants informés, sensibilisés, formés ;
  • La mobilisation de connaissances, par la recherche, l’innovation, la formation… mise en liens fluides avec la prise des décisions ;
  • Une organisation spatiale des territoires privilégiant les solidarités socio-écologiques : les lieux du développement humain s’organisent autour ou à proximité d’espaces où la biodiversité est durablement protégée, espaces reliés entre eux par des espaces interstitiels également accueillant pour biodiversité (corridors écologiques, zones tampon, suivant les termes employés).

 

Chaque réserve de biosphère est un « contrat social », sur un territoire qui a du sens pour ses habitants : sens le plus souvent issu de la géographie, de l’histoire, de conditions naturelles spécifiques et d’une culture qui s’est forgée à leur contact. Chacun, quelle que soit son activité, est engagé à s’en saisir, à s’interroger sur sa durabilité à long terme et à la faire évoluer pour offrir un avenir positif à ses successeurs. Le temps ne serait-il pas venu d’accompagner ces territoires et tous les autres, en s’appuyant sur leurs 50 ans d’expériences des réserves de biosphère et du programme MAB pour inspirer cette planification écologique et retrouver une relation plus équilibrée et soutenable entre les Hommes et la Biosphère ?

Octobre - 2022